Qui suis-je ?
D’aussi loin que je me souvienne, l’écriture a toujours été, pour moi , une manière d’exprimer mon indignation, ma peine.
Les sujets qui suscitaient ces émois chez moi, étaient variés.
Ainsi, mes premiers écrits datent de 1995 et étaient déjà le témoin de ma colère envers ce monde, à travers le film “La poursuite impitoyable” avec Marlon Brando, Robert Redford, Jane Fonda…
Le Réalisateur Arthur Penn y dénonce avec force, les travers de la société américaine : racisme, lâcheté, égoïsme…
Ce film qui date de 1966 est un formidable exemple de la couardise de L’Homme qui est un thème récurrent dans mes livres.
J’avais vingt-deux ans et écrire pour moi était, déjà, une façon naturelle de crier ma colère.
Mais, personne n’avait connaissance de ces épanchements.
Au fil du temps, j’ai reporté mes échecs, mes peines de cœur sur des cahiers et malheureusement mon inspiration n’a jamais tari… Ecrire m’a, alors, permis de m’alléger de ces poids et de toujours avoir le mot pour rire.
Agent administratif dans un organisme de recouvrement pendant dix-huit ans, la formation infirmière a représenté une renaissance pour la femme idéaliste que je suis.
Mais, j’ai rapidement été confrontée à la réalité du terrain.
En temps qu’étudiante, les stages ont parfois été compliqués, dans la mesure où je me mettais au service des patients vulnérables face aux pleins pouvoirs de certains soignants, aussi bien à l’hôpital que dans la vie quotidienne.
C’est ainsi que dans le prologue d’ “Albator ou la vie à tout prix”, je dénonce la maltraitance infantile dans une crèche hospitalière, alors que j’étais en première année. J’ai choisi de mettre cet épisode de ma vie scolaire en introduction, car c’est cette réflexion naturelle sur la vulnérabilité qui est à l’origine de l’histoire d’Albator. Je ne pouvais rester insensible à la souffrance de celui-ci comme les auxiliaires de puériculture avaient pu détourner le regard devant les agissements de leur collègue malveillante.
J’étais en troisième année lorsque je me suis battue, bec et ongles pour mon futur compagnon et force était de constater que le dysfonctionnement mis au grand jour sur le lieu de vie de ces enfants n'avait jamais quitté mon esprit.
Le choix du sujet de mon mémoire allait dans ce sens et est devenu une extension sur mon quotidien : “L’intérêt du soin relationnel dans la prise en charge infirmière”.
J’ai d’ailleurs fait apparaître ce devoir en annexe de mon livre “Trois ans et plus si affinités…”. J’y raconte mes désillusions sur le métier de 2017 à 2020, avec, au final, le bonheur, la joie inespérée de trouver un service qui me correspond et véhicule les valeurs auxquelles j’aspire.
Tout ceci me pousse à la conclusion que je continue, jour après jour, à répondre à la question de recherche de mon mémoire : “En quoi la motivation de l’infirmière dans le recours au soin relationnel influence-t-elle le maintien d’une relation symétrique avec un patient non communiquant ?”. La relation symétrique étant une relation d’égalité et s’opposant à la relation asymétrique, par définition une relation de pouvoir. Un patient non communicant étant une personne ne parlant pas la même langue que nous ou n’utilisant pas les mêmes codes que nous, ou encore une personne polyhandicapée, un jeune enfant… tout autant de personnes vulnérables qui mettent bien en évidence les jeux de pouvoir et d’abus qui peuvent être exercés par un soignant.
J’ai trouvé une réponse partielle dans mon dévouement à Albator qui ne pouvait crier sa douleur et son mal-être. Le lapin utilise à titre de codes, des messages posturaux que j’ai dû apprendre et déchiffrer. J’ai dû sortir de ma zone de confort pour le considérer dans toute sa différence : altérité, humanitude…
Parfois, l’idée d’une éventuelle hypersensibilité chez moi m’effleure. Mais lorsque je vois toutes les voix qui tentent de s’élever autour de moi pour dénoncer les maltraitances humaines ou animales, je me dis que rien n’est perdu.
Alors, je souris et j’espère encore et encore que mes livres ne seront pas une goutte d’eau dans l’océan, qu’ils feront renaître la banquise et les plages qui s’amenuisent.